Nos 4 plus grands défis dans le lancement d’un programme pancanadien d’échantillonnage des lacs

Elles sont parties!

Oui, nos 5 équipes de terrain : les rouges, les violets, les bleus, les jaunes et les verts échantillonnent les lacs de l’Ontario à la Nouvelle-Écosse depuis un mois. La carte ci-dessous montre les itinéraires de nos équipes.

Toutes les équipes sont parties ensemble, mais certaines resteront sur le terrain plus longtemps (de 6 semaines pour les violets à 10 semaines pour les bleus).

Chaque membre de chaque équipe est formé pour un rôle particulier : la personne des gaz dissous, la personne de l’eau et des filtrations, la personne optique et la personne des carottes de sédiments.

Image à droite : Nos guerriers de la limnologie : une détermination sans pareil, un intellect affuté… et un soupçon de folie.

Juste avant leur départ, nous avons organisé un atelier de formation pendant lequel nous avons formé les équipes de terrain comme des astronautes. Il a, bien sûr, fallu un peu moins de temps parce que notre programme de formation est beaucoup plus efficace que le programme de la NASA. Mais ce fut intense! Après trois jours, les équipes étaient prêtes à partir!

Maintenant, qu’elles sont parties dans leurs camionnettes, les équipes sont essentiellement autonomes… Mais notre base à l’Université de Sherbrooke est en communication constante avec elles, surtout quand elles ont besoin d’aide : « HoustonSherbrooke, nous avons un problème! »

 

 

 

Image à gauche : Nos équipes tentent d’attraper toutes sortes de choses : des virus d’influenza aviaire qui se cachent dans les sédiments (en haut à gauche, remarquez le style…), des bulles de méthane qui sortent du fond du lac (en haut à droite), un rhume en travaillant en pleine pluie (en bas à gauche) et des heures de sommeil perdues (en bas à droite)…

 

Nos équipes de terrain suivent un programme quotidien intense (voir ci-dessous) pour arriver à recueillir un large éventail de mesures. À chaque lac, nos équipes se divisent en deux sous-groupes qui travaillent en parallèle toute la journée. Pas une minute n’est perdue.

Chaque semaine, les équipes de terrain emballent leurs échantillons et les expédient à l’Université de Sherbrooke. Là, notre équipe de logistique déballe et expédie les milliers d’échantillons reçus dans d’autres laboratoires. Ils renvoient également du nouveau matériel aux équipes de terrain pour la semaine suivante.

Les photos amusantes que nous recevons des équipes de terrain montrent les nombreuses péripéties de leur voyage. Ne vous méprenez pas, c’est un énorme travail! Comme tous les autres membres de Lake Pulse, les équipes de terrain démontrent une énergie et une détermination incroyables. Nous sommes en effet tous très motivés, car nous croyons fermement que notre recherche permettra un grand pas dans notre compréhension des lacs canadiens.

Cette recherche aidera à expliquer l’impact des activités humaines sur les lacs, tels que les changements d’utilisation des terres, les contaminants, l’urbanisation et les changements climatiques. La carte ci-dessous montre les lacs sélectionnés pour cet été dans quatre écozones en fonction de leur taille et du niveau d’impact humain (les lacs aux extrémités ouest et est seront échantillonnés l’année prochaine, les ~220 autres cet été).

Le travail acharné des équipes de terrain apporte déjà des résultats! Cette semaine et la semaine dernière, les premiers échantillons ont été analysés à l’Université du Québec à Montréal (UQAM). Ces données passionnantes montrent déjà … oups, je m’égare dans un futur billet! Avant d’aller plus loin, permettez-moi de partager nos 4 plus grands défis au cours des dernières semaines.

Défi 1 : des chiffres apeurants!

Aucun d’entre nous n’a échantillonné autant de lacs dans différentes provinces avec autant de personnes sur le terrain en même moment – certains appellent notre campagne « complètement folle », d’autres « historique » (nos équipes de terrain préfèrent le terme  « héroïque »). L’expérience générale repose sur l’échantillonnage d’un nombre inférieur de lacs dans une seule région. Par exemple, un grand programme d’échantillonnage effectué par un laboratoire de recherche pourrait inclure 30 lacs avec environ 25 échantillons pour chaque lac. Cet été, notre réseau échantillonnera environ 220 lacs et recueillera des échantillons pour plus de 150 variables dans chaque lac! Pour ce faire, nous avons 5 équipes de 4 personnes qui voyagent avec une quantité impressionnante de matériel. L’efficacité est essentielle, ce qui nécessite une planification minutieuse et une préparation approfondie.

Le nombre total de bouteilles, de filtres, de flacons et d’autres accessoires d’échantillonnage est étonnant! Cet été seulement, nous utiliserons plus de 22 000 conteneurs. Beaucoup d’entre eux sont lavés à l’acide (et rincés trois fois) à la main pour s’assurer qu’ils sont propres. Pour préparer les montagnes de provisions, beaucoup de gens ont travaillé dur : nos stagiaires, la coordinatrice de terrain, la spécialiste en géomatique, les équipes de terrain et même notre directeur (et, d’ailleurs, quiconque il peut entraîner avec lui… voir l’image à gauche… et non, ce ne sont pas des enfants exploités, ils sont des bénévoles heureux préparant des sacs d’échantillonnage … pour une barre de crème glacée). Ensuite, tous ces articles sont méticuleusement emballés selon le type d’échantillon, ce qui aide les équipes de terrain à garder tout organisé.

Pendant la formation, les équipes de terrain ont collecté et organisé tout leur matériel… voir l’image en haut à droite… les corridors de l’Université de Sherbrooke n’ont jamais été aussi occupés.

La variété incroyable d’échantillons prélevés par nos équipes de terrain sera étudiée par 18 chercheurs et leurs étudiants à travers le Canada – aucun scientifique seul ne pourrait acquérir et utiliser cette information pour une telle variété de lacs. C’est la grande force de Lake Pulse. Des méthodes détaillées sur la façon de collecter les échantillons sont décrites dans notre manuel de terrain : 109 pages d’instructions. Une lecture de chevet parfaite (bien plus efficace que compter des moutons)!

Chaque échantillon prélevé doit être soigneusement étiqueté : oui, cela signifie également 22 000 étiquettes! Si les équipes prenaient 30 secondes pour étiqueter chaque échantillon, elles auraient passé au cours de l’été 183 heures à étiqueter des bouteilles, soit près de 20 jours (pour une journée de travail de 9 à 10 heures)! Si tous les membres de notre équipe avaient une écriture claire, ce ne serait peut-être pas si grave, mais ce n’est pas le cas! Heureusement, notre spécialiste en bases de données, Jelena Juric, peut faire des miracles pendant son sommeil… ou plutôt pendant les heures où elle devrait dormir! Elle a fait une petite base de données, écrit un peu de code et (roulement de tambour, s’il vous plaît) 22 000 étiquettes furent imprimées! Elles sont organisées par lac, temps d’échantillonnage et coordonnées avec le code d’identification dans nos fiches de terrain électroniques.

Image à gauche : Les violets ne perdent pas une seconde. L’étiquetage des bouteilles se fait dans le camion (et dans la joie), en se rendant au prochain lac. Go les violets!

D’ailleurs, pour ceux qui n’ont pas encore entendu, nous utilisons des fiches de terrain électroniques. Chaque équipe dispose de 2 iPad contenant des fiches de terrain électroniques, les itinéraires de voyage et des lacs alternatifs pour chaque lac (nous y reviendrons bientôt). Chaque nuit, nous recevons 4 nouvelles fiches de terrain électroniques provenant de chaque équipe de terrain! Heigh-ho, heigh-ho, HIGH TECH c’est mon boulot! (Nous n’avons pas de preuve, mais nous croyons que c’est ce que nos équipes de terrain chantent toute la journée.)

Défi 2 : La logistique complexe et l’échantillonnage dans des régions éloignées

Chaque semaine, nos équipes envoient environ 30 litres d’eau lacustre (une grande partie doit rester gelée) à l’Université de Sherbrooke pour distribution à différents laboratoires dans notre réseau de recherche. Nous devons ainsi expédier de la glace sèche (dioxyde de carbone solide utilisé pour la réfrigération, qui sublime à -78,5 °C) pour les équipes de terrain, qui sont parfois dans des endroits éloignés. Une fois qu’elles reçoivent la glace sèche, les équipes doivent rapidement emballer et expédier leurs échantillons réfrigérés. Mais, déterminer où envoyer la glace sèche et d’autres fournitures urgentes implique une logistique difficile – nos équipes ne savent pas toujours exactement où elles seront et quand! Un grand merci à Odile Couture, notre secrétaire départementale dévouée, qui a harcelé les compagnies de transport pendant des semaines pour organiser le tout.
              

Les nomades de Lake Pulse se font accueillir par différentes institutions à travers le pays pour leurs envois. Ici, ils préparent leur glace sèche (à l’Université Queen’s) ou organisent leurs échantillons (à l’Université de Moncton), puis sur la route encore.

Défi 3 : la météo et autres inconvénients « mineurs »

Soleil ou pluie, nos équipes de terrain sont là. Elles font des efforts incroyables pour échantillonner 1 lac par jour dans toutes les conditions. Bien sûr, il y a des limites : des tempêtes de grêle sont l’une d’entre elles (voir la vidéo ci-dessous)! Étonnamment, cette équipe a réussi à terminer la plupart de ses échantillonnages! Bravo les jaunes!

Un inconvénient inattendu pour de nombreuses équipes est que le travail de terrain nécessite de ne pas porter de déodorant, boire de café ou appliquer un chasse-moustique avant de prendre des échantillons d’eau (nous avons bien sûr annoncé ce petit détail après qu’ils aient accepté de participer…). Certains échantillons sont si sensibles que ces précautions sont nécessaires pour éviter la contamination. Cela nous permet d’obtenir des mesures de pointe de petites quantités de produits chimiques dans les lacs. C’est vraiment cool, et nous remercions nos équipes de terrain pour ce petit sacrifice de leur confort (mais nous sommes vraiment heureux que quelques centaines de kilomètres séparent leurs corps de notre nez)!

Défi 4 : les êtres humains

Nos équipes doivent échantillonner 1 lac par jour, 5 à 6 jours par semaine. L’échantillonnage de ces nombreux lacs nécessite de savoir comment trouver efficacement un lac et comment accéder à celui-ci de façon sécuritaire. Durant ce printemps, 4 étudiants ont préparé des « paquets de lacs » (leur stage a certainement commencé de façon un peu ennuyante, mais maintenant ils testent leur bon travail en participant à la campagne de terrain). Ces paquets fournissent aux équipes des informations sur le lac (comme la taille, l’emplacement et la bathymétrie, lorsque disponible), les informations d’accès et les numéros de téléphone d’urgence dans la région.

De loin, le plus difficile est d’obtenir l’accès aux lacs. En fait, pour la moitié des lacs sélectionnés, nous n’avons pas pu confirmer l’accès avant le départ des équipes. Par conséquent, les équipes doivent réussir à accéder à un lac une fois qu’elles arrivent sur place. Généralement, les problèmes d’accès ne sont pas du fait qu’un lac est inaccessible par la route (si vous avez lu notre billet précédent, vous savez que nous avons sélectionné des lacs relativement proches des routes). C’est simplement parce que, pour de nombreux lacs, nous avons besoin d’un propriétaire riverain pour nous permettre d’accéder au lac. Cela fonctionne généralement bien, car les personnes sont habituellement disposées à nous permettre de mettre en place notre laboratoire mobile (une tente) et d’accéder au lac à partir de leur propriété.

Malheureusement, parfois, cela ne fonctionne pas. Il s’avère que certaines personnes ne veulent pas que nous ayons accès aux lacs… voir l’image à gauche.

La pire excuse que nous avons entendue jusqu’ici : « Si les gens entendent parler de notre lac à travers votre recherche, ils pourraient visiter notre lac. » Nous n’aimons pas beaucoup le fameux panneau anonyme « Défense d’entrer ». Notre équipe rouge a fait face à un tel panneau après avoir découpé un arbre tombé sur son chemin (en utilisant une scie à élagage de 20 cm, voir l’image à droite, nos bûcherons en devenir!) pour atteindre un lac. Juste avant cela, l’équipe avait essayé d’accéder à 3 lacs alternatifs (c’est-à-dire des lacs de remplacement qui étaient présélectionnés pendant la phase de planification, au cas où les équipes n’auraient pas pu accéder à leur lac cible). Avec personne pour permettre l’accès au lac, l’équipe est repartie bredouille. Mais, nous admirons sa détermination! Bravo les rouges!!

Nous avons sélectionné 680 lacs « représentatifs » du vaste nombre de lacs à travers le Canada. Les échantillons prélevés par nos équipes de terrain sur ces 680 lacs seront utilisés pour développer une meilleure compréhension des lacs à travers le Canada à l’aide d’outils tels que l’imagerie satellitaire et la modélisation spatiale.

Au cours des prochaines années, nous développerons de nouveaux outils afin que les Canadiens puissent mieux surveiller la santé de leurs lacs. Selon nous, si votre lac est échantillonné par une de nos équipes de terrain, c’est comme gagner une loterie! C’est une occasion rare d’en apprendre davantage sur votre lac en fonction de l’échantillonnage en profondeur uniquement pour ces 680 lacs. Toutefois, si votre lac n’a pas été choisi parmi les 680 lacs « représentatifs », vous pouvez toujours bénéficier des outils Web que nous développons. La meilleure chose serait de vous assurer que vous avez une sorte de programme de surveillance de lac en place. Cela vous aidera à bénéficier de nos outils à l’avenir. Nous voulons faire de la surveillance de la santé des lacs une tâche plus facile pour tous. Cela profitera aux gens de divers secteurs, que ce soit les riverains, les fermiers, les gestionnaires de lac ou une société minière.

Go Lake Pulse!

Les lacs répondent aux changements qui se produisent dans leur bassin de drainage en raison de leur rôle spécial en tant que receveurs d’eau traversant le bassin hydrographique (avec les contaminants que cette eau contient). De nombreux lacs et écosystèmes aquatiques montrent des signes de changement. Nous pouvons mieux gérer ces ressources en comprenant comment atténuer notre impact sur ces systèmes naturels. Dans notre réseau, nous abordons cette question à très grande échelle – à l’échelle du Canada – afin de fournir à nos divers partenaires et à tous les Canadiens un meilleur portrait sur la santé des lacs et des bassins versants. Grâce à une meilleure compréhension des principaux facteurs de stress sur la santé des lacs, nous pouvons nous pencher sur la manière d’être plus efficace pour protéger et conserver nos lacs.

Chaque lac offre quelque chose de spécial… certains, par contre, sont un peu plus compliqués à échantillonner! 

Bonne chance pour la suite à nos équipes de terrain!

Si vous voyez un de ces camions, allez les voir…

et si vous demandez gentiment, ils vous donneront même un de nos magnifiques dépliants!

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